Association républicaine, la Ligue est soucieuse d’améliorer la situation économique et sociale ainsi que les droits politiques des populations relevant, selon son expression, « des territoires lointains » ou « d’outre-mer », formules se substituant au terme de « colonies ». L’anticolonialisme a longtemps été minoritaire dans l’organisation. Toutefois, la dureté des répressions (actes de torture et massacres) suscitent des contestations de plus en plus vives et finalement une remise en cause de systèmes coloniaux en contradiction avec les valeurs de la République.
Longtemps, la colonisation fut considérée comme source de progrès pour des sociétés à civiliser, même si le colonialisme existant devait être critiqué, transformé et réformé. Au congrès de 1952, les rapports de Paul Rivet et de Charles-André Julien prévoient ainsi des transformations négociées. La Ligue soutient alors l’Union française. Les perspectives d’émancipation inquiètent toutefois ceux qui redoutent les dangers de l’expansionnisme soviétique et du fanatisme religieux, associés aux nationalismes du « tiers monde ».
Après la guerre d’Indochine, qu’elle a condamnée, la Ligue est surprise par les premiers « événements d’Algérie ». Elle accepte le rétablissement de l’ordre tout en appelant à des réformes sociales et au respect du statut voté en 1947. La radicalisation du conflit et l’état d’urgence ne lèvent pas sa position ambiguë jusqu’au soulèvement du Constantinois à l’été 1955. La victoire du Front républicain en 1956, souhaité par la Ligue, lui fait espérer des négociations et à terme la paix et même l’indépendance « si elle est voulue par le peuple algérien ». Elle se démarque nettement du gouvernement Mollet et condamne avec la force la torture. Si elle n’approuve pas le FLN, elle juge que la répression est souvent à sens unique. Finalement, elle défend moins la cause que les droits des accusés.
Avec Daniel Mayer, la Ligue s’ouvre aux militants anticolonialistes comme Madeleine Rebérioux ou Jean-Jacques de Felice, Yves Jouffa, Daniel Jacoby, Gisèle Halimi, Pierre Stibbe. Elle aide des structures comme le Comité Audin, elle diffuse des textes censurés tels La Question. Certains Ligueurs ne partagent cependant pas ces vues. Paul Rivet soutient l’action de Jacques Soustelle. Marius Moutet est favorable, comme d’autres, à un empire libéral et assimilationniste, mais aussi à l’ordre, à Madagascar, en Indochine et dans une « Algérie française ».
Poste de combat, Rivière de Saigon (Indochine), gouache sur papier, 1950
Lucien-Victor Delpy (1898-1967)
La contemporaine/ OR_000623 ©La contemporaine
Grève de dockers à Port de Bouc, huile sur toile, 1950
Boris Taslitzky (1911-2005),
La contemporaine/ OR_000623 ©La contemporaine/Adagp, Paris, 2018
Peintre, résistant et déporté, militant communiste, Boris Taslitzky illustre ici le combats des dockers CGT contre la guerre d'Indochine.
"Observation. Vallée de l'Amam. Pendant l'opé. 'Jumelles',(Algérie)", plume, lavis, 1959
Jean-Claude Mayodon (1938-1981)
La contemporaine/ OR_001380 ©La contemporaine
"Indochine 1954" in Les cahiers des droits de l'Homme, n°7, 8 et 9, mai-juin-juillet 1954
Dir. Emile Kahn (1876-1958)
La contemporaine/ 4P00298 ©La contemporaine
Algérie : rapport introductif in Les cahiers des droits de l'Homme, mai-juillet 1956
Emile Kahn (1876-1958)
La contemporaine/ 4P00298 ©La contemporaine
La guerre d’Algérie : lutter contre la torture.
Extrait d'entretien avec Madeleine Rebérioux, 2003, 02'03''
Les manifestations contre la guerre d'Algérie
Extrait d'entretien avec Henri Leclerc, 2003, 02'20''
Henri Leclerc : avocat au Barreau de Paris, militant anticolonialiste, militant du PSU (1960-1972), co-fondateur du Cabinet d’Ornano, membre du Conseil de l’Ordre des avocats (1982-1984). Après avoir été brièvement membre du comité central de 1967 à 1971, il le retrouve en 1984, date à laquelle il prend également la tête de sa commission Immigrés. Il préside la Ligue de 1995 à 2000.
Les pratiques de l'armée française pendant la guerre d'Algérie
Extrait d'entretien avec Michel Blum, 2003, 00'50''
Michel Blum : avocat à la Cour d’appel de Paris. Il devient membre du comité central de la Ligue des droits de l’Homme en 1963, et a longtemps été secrétaire général adjoint (1964-1973), puis secrétaire général (1973-1983) de la Fédération internationale des ligues des droits de l’Homme (FIDH), avant d’en assurer la présidence (1983-1986).
La guerre d’Algérie : une législation d’exception
Extrait d'entretien avec Robert Badinter, 2018, 02'00''
Robert Badinter : garde des Sceaux (1981-1986), président du Conseil constitutionnel (1986-1995), sénateur socialiste des Hauts-de-Seine (1995-2011). Il a rejoint la Ligue des droits de l’Homme à partir de 1972, et a été membre de son comité central de 1976 à 1981, il en est membre honoraire depuis.