Île de Port Iéro le 9 octobre 1915

Comtesse.

Je rends réponse à votre aimable lettre que je viens de reçevoir (sic) à l'instant je serais enchanté de pouvoir vous donner des nouvelles de vos neveux mais pour le moment cela m'est impossible car je suis à 16 heures des Dardanelles. Nous sommes dans une île grecque je ne sais pas encore combien de temps nous y restons. Je serais heureux de m'en aller car de nouvelles nous n'en avons pas souvent. Voilà 15 jours que nous sommes ici nous avons eu une seule fois [du] courrier c'est tout de même trop peu enfin espérons que les prochains courriers seront plus réguliers. Avec tout cela il y a encore eu un courrier français de coulé et 3 anglais par ces maudits boches qui ne méritent pas un autre nom. Peut être que dans ce courrier j'avais quelques lettres tempi (sic) il vaut mieux que ce soit un courrier qu'un cuirassé car sur un cuirassé il y a 7 à 800 hommes tandis que sur ce courrier il y avait au plus 80 hommes. Voilà encore une nation de plus contre nous ces salauds de Bulgares¹. Mais je cois qu'ils ne seront pas les seuls la Roumanie² et la Grèce³ vont sûrement se mettre de la partie alors ça équilibra (sic) un peu de chaque coté. Je viens de recevoir une lettre de mon malheureux frère il me dit qu'il n'y a encore rien pour lui que pourtant il trouve drôle de voir des camarades de son atelier partir il y en a 7 qui sont partis le mois dernier lui ça lui semble drôle de rien avoir pour lui. Du Mire de Villers je n'ai encore pas eu de réponse c'est qu'il lui tarde de sortir de là-dedans. Sur sa lettre il me disait qu'il aurait été vous voir s'il venait qu'à sortir moi je lui ai répondu que vous n'habitiez plus Paris mais ça ne fait rien il pourrait quand même aller jusqu'à chez vous. Comme nouvelles de la guerre je ne connais toujours rien. Ici pour nous c'est fini jamais nous n'arriverons à passer le détroit il est trop miné et d'ailleurs il est infranchissable notre seul travail est de leur tenir tête avec nos troupes de terre de manière à ce qu'ils n'avancent pas. Mais je crois que nous allons tenter un autre coup par Salonique avec de nouvelles troupes⁴ là nous réussirons peut être à faire quelque chose de (?) bon mais par mer c'est fini. Je suis toujours en parfaite santé et souhaite que vous vous trouvez de même à l'arrivée de mes cartes. Le 7 octobre nous avons enterrer un de nos camarades un matelot mécanicien mort de la dyssenterie (sic) le pauvre malheureux il est bien loin des siens.

A. HOREL